Depuis longtemps, on a confondu en la personne de Marie Madeleine trois femmes que les Evangiles placent dans l’entourage ou sur le chemin de Jésus. La pécheresse innommée, qui lors du repas chez Simon le Pharisien inonde de parfums les pieds du Seigneur, puis les essuie avec ses cheveux. Marie de Béthanie, sœur de Marthe et de Lazare qui s’attache à jésus, le reçoit dans sa maison et obtient de lui la résurrection de son frère. Marie de Magdala, guérie par jésus des démons qui l’habitaient, présente lors de la crucifixion et de la mise au tombeau et à qui le Christ réserve sa première apparition après sa résurrection. Cette identification d’une seule proposé par Grégoire le Grand a influencé l’iconographie et le culte de Marie Madeleine en Occident et la liturgie romaine en identifiant ces trois femmes en une seule, a donné son approbation à la tradition ancienne. A la fin du Moyen Age et même à l’époque moderne, on a longuement ébattu pour savoir s’il y avait dans la Madeleine trois femmes ou une seule, mais il est vrai que Marie Madeleine était déjà depuis très bonne heure une des saintes les plus vénérées, et la croyance populaire des catholiques occidentaux ne pouvaient plus être modifiée, ni par la théologie, ni par l’érudition. La tradition étant la plus forte, la plus enracinée, donc… après l’Ascension du Christ avec Marthe, Lazare, les saintes Femmes et Maximin, Marie Madeleine serait arrivée en Provence, où les trois, frère et sœurs auraient convertis à la foi chrétienne de nombreuses populations. Lazare à Marseille, Marthe à Tarascon aurait vaincu la Tarasque, dragon qui hantait le Rhône avec la Croix et l’eau bénite. Les saintes Femmes, Marie Salomé et Marie Jacobé avec leur servante Sara seraient restées aux Saintes-Maries-de-la-Mer, et Maximin serait devenu l’évêque d’Aix-en-Provence. Marie Madeleine se serait retirée du monde pour faire pénitence dans une grotte (la Sainte Baume), où elle aurait vécue trente trois années, nourrie par les dons du ciel, soutenue par ses ravissements : sept fois par jour des anges l’élevait dans les cieux pour lui faire entendre des musiques célestes. Sa dernière heure venue, elle serait descendue dans la plaine, où Maximin venu à sa rencontre lui aurait donné sa dernière communion. On voit donc, que le culte des saints a été de tous temps, une des composantes importantes de la religion populaire. Aujourd’hui, ils sont encore près de nous et leurs compagnie à toujours joué un rôle important dans la vie de millions de personnes, des plus humbles aux plus grands seigneurs. C’est ainsi, que fruits d’une dévotion particulière, à l’exemple sans doute de la Famille ducale de Lorraine pour notre fresque de la Sainte Baume, ou d’une façon plus générale, la représentation de grands saints, les vitraux de notre Basilique ont été voulus, et créés à l’image de ces êtres bénits. « À cette dimension religieuse, se
mêle étroitement une autre dimension historique et
politique importante en ce qui concerne les vitraux de l’abside.
Le duc donateur s’est tout naturellement fait représenter
sous la protection de celui dont les reliques attirent ici un nombre
immense de pèlerins. Cette protection évoque la bataille
de Nancy en 1477. Elle rappelle, que René II a attribué
son succès à saint Nicolas. L’instituant patron de
la Lorraine, et son église : sanctuaire National des Lorrains.
L’image de l’Annonciation placée devant celle
du duc, confirme l’allusion à la bataille de Nancy,
(l’Annonciade) figurait sur l’étendard ducal lors de
la bataille. Le costume somptueux que porte René II n’est
pas pourtant celui d’un guerrier, mais plutôt celui
d’un fastueux prince de la Renaissance. Armure et cotte
d’armes aux couleurs de Lorraine reviennent au second donateur
figuré dans cet ensemble avec saint Antoine de Padoue,
c’est donc l’héritier au trône ducal, Antoine
habillé en armes qui évoque l’idée du prince
de guerre. Les figures de René II et de son fils sont
complémentaires. Leur lien est souligné par
l’absence délibérée dans ce programme des
épouses des princes : Philippe de Gueldre et Renée de
Bourbon. Ce qui compte ici, c’est affirmer la
légitimité de la nouvelle dynastie desLorraine
Vaudémont et sa continuité. Les armoiries en place
contribuent à cette idée l’amplifiant même.
René II, petit fils du roi René en est aussi
l’héritier lésé. Ses armes et celles de son
fils en témoignent, elles rappellent leurs prétentions
déçues sur quatre royaumes, Hongrie, Sicile,
Jérusalem, Aragon et le duché d’Anjou englobant le
comté de provence. En apparence le programme iconographique
développé dans les trois verrières est conforme
à la tradition du Moyen Age. Il montre un déploiement de
figures qui représentent non sans un souci de hiérarchie
une image de l’Eglise universelle. Ce sont au second registre les
quatre Pères de l’Eglise, puis au troisième des
évêques, peut-être des évêques de Toul
» Au quatrième registre, autour de la Vierge et sainte Anne, trois saintes légendaires, souvent associées dans leur martyre et dont le culte au Moyen Age était l’objet d’une immense vénération : sainte Marguerite, sainte Barbe et sainte Catherine d’Alexandrie étaient comptées dans le nombre des quatorze saints auxiliateurs, et aussi tout spécialement dans ce registre, comme une allusion à la résistance acharnée des habitants de Nancy en 1475 lors du siège de la ville par le Téméraire, la figure de sainte Geneviève de Paris, elle avait encouragée et empêchée les habitants de Paris de fuir lors de l’invasion d’Attila, et dans les derniers registres, les apôtres disciples du Christ avec dans les tympans, des anges portant les instruments de la Passion, ainsi que Dieu le Père bénissant, avec le monde dans sa main. « À ce programme cohérent se mêlent pourtant quelques figures dont la signification est tout à fait particulière dans l’esprit de la famille ducale. Au troisième registre, la présence des figures de saint Georges et de saint Antoine prennent une valeur plus locale et personnelle : saint Georges est le patron de la très importante collégiale qui jouxte le palais ducal de Nancy ; avec celle de saint Nicolas, sa protection à été invoquée à la veille de la bataille de Nancy ; saint Antoine ermite est souvent figuré comme le patron du duc Antoine. Au second registre, enfin, entre les Pères de l’Eglise, les images de sainte Marthe et sainte Marie Madeleine. Ces deux saintes provençales par excellence, évoquent à nouveau toute l’importance que porte René II à l’héritage de son grand Père, le roi René. » En fait, le roi René à la mort de sa femme Isabelle en 1453, abdiquera de son duché de Lorraine en faveur de son fils Jean II. Après un bref séjour en Anjou et des campagnes militaires en Italie dans l’espoir de garder ses royaumes italiens, mais qui se solderons par, un échec, il se fixe à Aix-en-Provence et se remarie à 47 ans avec Jeanne de Laval, (une beauté de 21 ans). Dès lors, le roi René ayant renoncé à la conduite des affaires, préférant écrire et s’entourer d’artistes et savants, jouant à plein son rôle de mécène, deviendra celui que l’on appelle encore aujourd’hui en Provence, le bon roi René. En 1480, René 1er meurt à Aix-en-Provence le 10 juillet. Son corps est transféré en la cathédrale d’Angers. Son testament est aussitôt exécuté. Son neveu Charles II du Maine, reçoit Anjou et Provence, René II qui a déjà la Lorraine depuis 1473, à la suite des décès des ducs Jean II et Nicolas, reçoit Bar. Son autre neveu, Louis XI n’aura rien. (Mais on peut faire confiance au roi de France, il va bientôt se rattraper). En effet un an plus tard, le 11 décembre 1481, Charles II du Maine meurt sans héritier. Le Maine, l’Anjou et la Provence qui était sorti un siècle plus tôt du domaine royal quand ces provinces avaient été constituées en Apanage en faveur de Louis 1er d’Anjou, frère du roi de France Charles V, sont réintégrées dans le domaine royal, au bénéfice de Louis XI. Désormais, s’en est bien fini des prétentions de René II. Mais la Maison de Lorraine n’est pas de caractère à se lamenter. Elle a d’ailleurs des défis à relever et à défendre. « Les figures, princières placées au bas de l’ensemble de l’abside lui donnent tout son sens. René II et son fils, parmi le cortège des saints et des saintes, ne sont pas des hommes (ordinaires). Le duc, héros de la chrétienté, favorisé dans ces entreprises par saint Nicolas, est montré comme le protecteur, voir comme le chef de l’Eglise de ses Etats. Ces liens étroits entre le pouvoir ducal et l’Eglise romaine ne cesseront d’ailleurs de s’affirmer tout au long du XVIè siècle : moins de quinze ans après l’achèvement des verrières de l’abside de Saint-Nicolas, le duc Antoine franchit les Vosges pour écraser la révolte des rustauds, faisant de la Lorraine le bastion avancé du catholicisme, face au monde germanique en passe d’adhérer à la réforme. » Paroles de René II, après la Bataille de Nancy : Non voulant approprier à lui louanges, rendit gloire de sa victoire à Dieu, la Vierge sa mère, pareillement appropria l’honneur à Monseigneur Saint Nicolas, en le réputant Père du Pays, duc et défense de Lorraine. |